Innovation : espoirs et réalités

Depuis quelques années,   nombre d’experts sont unanimes pour affirmer que l’innovation constitue une réelle solution pour relancer la croissance  et résoudre le problème du chômage. Les  innovations concerneront la plupart des secteurs d’activités pour  des applications de nouveaux produits, d’amélioration de produits existants  et bien sûr  pour des gains de productivité. Elles s’appuieront essentiellement  sur le numérique, les bios   et les nano technologies. Certains experts nous  annoncent avec certitude  une nouvelle révolution technologique comparable  à celles  de l’électricité ou de la machine à vapeur. En période de crise, on ne peut que s’en réjouir.

Il  faudrait  cependant  en nuancer les espoirs et ce  pour plusieurs raisons :

Les innovations ne vont  que saupoudrer l’activité  économique ;  à ce jour il n’y a pas d’invention géniale  susceptible de   changer  radicalement notre mode de  vie. Le  mail qui vous annonce que  la date de péremption de vos yaourts au  frigo  est dépassée  ne va pas révolutionner votre quotidien. Beaucoup d’applications concerneront le domaine médicale et feront l’objet de remboursements  privés ou publics,  et donc de réticences. D’autres applications relevant de la loi, permettront une meilleure  protection de l’environnement  et se  traduiront  par un coût direct sur les produits ou les services  proposés   par l’entreprise.

Mais surtout, on oublie de dire que les projets d’innovation sont avant tout conçus dans le cadre de l’activité d’entreprise. L’entrepreneur qui envisage  un  projet  innovant doit d’abord  élaborer un compte d’exploitation prévisionnel   intégrant   les revenus et les coûts  associés  au   nouveau produit. C’est un exercice délicat  car    il faut déterminer un marché futur pour lequel il n’ y a pas forcément de repères. On est dans un processus  de décision  d’investissement en situation d’incertitude pour lequel le jeune ingénieur créatif n’a pas  forcément été préparé. Ceci explique en partie  la  part importante des projets qui échouent. Ce sont surtout des PME/PMI qui se lancent dans  l’innovation  mais face aux risques elles  ne    bénéficient pas toujours  d’un matelas de sécurité.

Il y  aura  donc forcément  un grand nombre d’échecs mais  il  faudra aussi s’attendre à  des effets de surprises, c’est   à dire à  des   innovations  qui   auront   des développements considérables et  inattendus. Par exemple   les  SMS avaient été conçus pour des échanges d’informations techniques vers le portable et non pas  comme moyen de dialogue entre utilisateurs. Autre exemple, le protocole   de communication  IP  utilisé par  l’Internet avait été  élaboré aux US  par des militaires et des chercheurs pour  la mise en commun de  leurs  travaux. Plus récemment, la nouvelle croissance dans beaucoup de pays africains s’explique en partie par l’usage du téléphone portable  qui facilite   la gestion des projets sans avoir eu à   construire un réseau de téléphone fixe.

Il convient donc d’être modeste par rapport aux  visions  d’avenir. Quelques mois  d’erreur dans un compte d’exploitation prévisionnel  peuvent conduire à remettre en cause l’espoir de réussite d’autant plus que les marchés potentiels    se situent   au niveau international dès le lancement du projet avec évidemment un potentiel de concurrence important et réactif. Pour les experts, l’ordre de grandeur du long terme est  de plusieurs décennies  mais ils ne  précisent pas  la  période à partir de laquelle nos économies  auront  retrouvé le plein emploi.

A l’échelle d’un pays il s’avère que l’on n’a pas  le choix ; quid du pays qui ne voudrait pas anticiper cette nouvelle révolution ? Il faut donc tout mettre en œuvre ,  avec beaucoup d’imagination, pour qu’en France, les conditions de création    et de pérennité  des start-up  soient aussi favorables   qu’à l’international : incitations fiscales, protection des brevets,  culture d’entreprise favorisant le passage de l’invention à l’innovation,  structures de support.       En fait, adhérer à l’ « ardente obligation des Réformes » !… Il faudra également un suivi statistique global plus efficace que  ce que   les outils actuels de l’INSEE produisent.

Plus généralement on peut aussi se poser la question de savoir si notre système économique n’est pas condamné à l’innovation permanente pour se maintenir en équilibre,  comme c’est le cas avec le commerce international  et la  mondialisation.

Le contenu de cet article a été intégré dans l’essai « Le numérique, c’est l’économique » accessible par l’article : Le numérique, c’est l’économique, en tête du blog :    

https://www.theoreco.com/macroeconomie-mondialisation/le-numerique-cest-leconomique-683.html

Bernard Biedermann

Conjoncture et décisions

http://www.Theoreco.com

Juillet 2014

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